FONTAINE AMÉDÉE-LARRIEU

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> NATURE/CONSTRUCTION: En fonte de fer et en pierre (10 blocs pour la fontaine centrale). La halle remarquable par ses poteaux et ferronneries de style Art Nouveau.  "Les architectes, associés au sculpteur, ont su puiser dans le répertoire classique tout en y introduisant les accents fluides et souples de l'Art Nouveau." 

> ÉTAT: Toujours existante, accessible au public, et en fonctionnement.

Coordonnées GPS: 44.83022, -0.58144.

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=> la CARTE:

La place Amédée Larrieu forme la pointe d'un triangle dessiné par la rue Louis Mie et la rue de Belfort qui convergent vers la rue de Pessac. La place s'appelait d'ailleurs "Place de Pessac" jusqu'en 1896, en raison de la proximité de cette très ancienne voie menant donc à Pessac. Elle est encadrée par deux rangées de platanes et comporte plusieurs bancs. En 1866 est inauguré un marché couvert dit "de Belleville", ouvert tous les jours jusqu’à 13 heures et réputé pour la qualité de ses produits du terroir,  mais l'activité a cessé en 1974. Cette place qui avec le temps n'était plus forcément très accueillante a été redessinée en 2006 et est redevenue un lieu agréable à fréquenter...

Sur cette place on trouve donc l'une des plus imposantes fontaines de Bordeaux, inscrite aux monuments historiques (par l'arrêté du 29 octobre 1975), relativement méconnue des Bordelais et assez peu visitée...☹

À sa mort en 1896 à l'âge de 46 ans, Eugène Larrieu, propriétaire de Château Haut-Brion (où ce dernier est décédé), député de Gironde et préfet de Bordeaux, lègue 150 000 francs à la Ville de Bordeaux : il demande que soit érigée une fontaine en l'honneur de son père: Amédée Larrieu, riche viticulteur du bordelais, ancien préfet de la Gironde et député à l'Assemblée Nationale en 1871. Pour la petite histoire, ce monument avait décroché le Grand-Prix et la médaille d’honneur de la 5ème Exposition universelle à Paris en 1900 (la même année Raoul Verlet fut fait officier de la Légion d’honneur).

Ce leg de 150 000 fr était sous double condition :

(journal/la-petite-gironde/8-juin-1900)

Le 6 mars 1897, un concours réservé uniquement à des artistes français est lancé (la dépense totale ne devait pas dépasser 75 000 francs). La mairie reçut plus de cinquante demandes d'autorisations à concourir et 23 projets furent déposés en date finale du 15 Novembre 1897. Les projets furent exposés lors d'une exposition public au terme de laquelle devait être désigné le vainqueur. La presse donna de multiples appréciations sur les études, mais dans l'ensemble elle fut unanime pour vanter les qualités de 3 projets nommés: Bordeaux I, Burdigala et Burdigala Rex. 

C’est le projet du sculpteur Raoul Verlet (charentais d’Angoulême qui étudia à Bordeaux de 1884 à 86), associé aux architectes Raymond Barbaud et Edouard Bauhain, qui est retenu le 14 décembre 1897 après une journée entière de délibérations et 3 votes successifs. Le 1er prix s'élevait alors à 3000 Francs. Les travaux de maçonnerie sont réalisés entre 1899 et 1902 par l’entreprise de Bernard Hauret. 

La fontaine Burdigala a failli ne jamais s’installer place Amédée-Larrieu parce que les édiles de l’époque la trouvaient trop belle pour un lieu si modeste. Une pétition du quartier la sauva de l’exil. 


Cette fontaine comportant de nombreux personnages, est riche en symboles et est composée de 3 éléments distincts:


La fontaine principale, baptisée "Burdigala" par son sculpteur (ancien nom antique de la ville de Bordeaux), est une allégorie de l'eau et du vin en référence à la région, à ses vocations maritimes et commerciales. On peut ainsi voir sur la face antérieure rue de Pessac deux tritons (dieu marin dans la mythologie grecque) et un dauphin qui supportent un ensemble rocailleux en forme de coquillage, qu'escaladent deux enfants vendangeurs et d'où surgit un poisson. Une tortue (représentant l’immortalité et la sagesse) et quelques escargots cheminent çà et là. 

Au sommet de la fontaine une femme se saisit d'une grappe de raisin tout en surplombant les deux chérubins, l'un qui pratique la vendange tandis que l'autre déguste quelques graines du fruit de la vigne. 

Sur la face arrière, un mur formant quai, avec des anneaux d'amarrage est sculpté d'une tête barbue d'océan. Une barque flotte sur les vagues, chargée de barriques, de sacs et de balances. On découvre sur ce voilier une nymphe (déesse dans la mythologie Grecque et Romaine). 

Sur la face donnant rue Louis Mie on trouve le blason de Bordeaux, un bélier (symbolisant la fertilité) et une ancre de bateau. Coté rue de Belfort, on trouve cette fois ci un coquillage, une écrevisse et un cep de vigne.  

Parmi ces produits du terroir, on distingue donc: des cèpes, des fraises, des pieds de vigne, grappe de raisins, des langoustes, des escargots, des palourdes et des coquilles Saint-Jacques. (Miam miam, Philippe Etchebest nous ferait un festin avec ça !!! 😊)

Sur l’étrave de la barque, les créateurs de l’œuvre (sculpteurs et architectes) ont imposé leur signature.

Sur chacune des extrémités du bâtiment arrière sont adossées deux fontaines dont l'une est décorée d'une nymphe et d'un poisson remplissant un coquillage, et l'autre d'un coquillage, d'un triton terrassant un poisson volant. A cette ornementation sont ajoutés des pampres ainsi que deux mascarons surmontant chacune de ces fontaines, l'un en forme de coquille à face humaine, l'autre joufflu et soufflant. 

Voici ce que l'on peut lire sur le haut de chacune de ces 2 fontaines :

La fontaine "Burdigala" a bénéficié d'un lifting d’envergure en mai 2018, pour une durée de huit mois (le square inauguré en 1902 n’avait jamais connu de travaux depuis). Ce chantier coûtera 250 000 euros, il s’intègre dans le plan global de rénovation des fontaines de la ville initié par l'élu Fabien Robert (adjoint à la Culture). Il s’agira de redonner sa splendeur à la fontaine principale Burdigala, mais aussi de rénover les deux autres adossées au mur du fond. La pierre de cette fontaine est en très mauvais état et l’ouvrage a dû être vidé de son contenu car le bassin fuyait.


NOTE: Il y a quelques années, la tortue de la statue avait une tête en laiton. Cependant cette dernière fut volée. Aujourd'hui, cette tête a été refaite en pierre...


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ANECDOTES ET INFORMATIONS ANNEXES

> Cette statue centrale en a croisé une autre de Bordeaux, lors de la 5ème exposition universelle de Paris de 1900, c'est une réplique de la liberté d'Auguste Bartholdi. Version d'un peu moins de 3 mètres de haut, commandée par Bartholdi lui-même en 1889, puis exposée en 1900 lors de L'Exposition universelle. La même année, le sculpteur exprime le désir que l’État l'achète, ainsi que d'autres modèles dont celui du Lion de Belfort, pour le musée du Luxembourg (le musée d'art moderne de l'époque). Comme aucune de ses œuvres ne figurait à cette époque au Luxembourg, Bartholdi s'engage à les céder contre le simple remboursement du prix de la fonte. La proposition est acceptée, sans que le musée ne leur trouve une place dans des salles déjà très pleines. La solution sera trouvée en 1905, après la mort de Bartholdi. La veuve du sculpteur propose de placer la Liberté à l'extérieur du musée, dans les jardins. Elle va y demeurer 115 ans, de 1906 à 2011, jusqu'à ce que le Sénat, propriétaire des jardins du Luxembourg, accepte généreusement de restituer l’œuvre au musée d'Orsay.😊

=> Bartholdi dont il sera question pour deux autres fontaines bordelaises: notamment justement la fontaine de la statue de la Liberté Place Picard, et le projet de fontaine du monument aux Girondins sur les Quinconces (œuvre de Bartholdi aujourd'hui place des Terreaux à Lyon, elle aussi présentée à une exposition universelle😊, mais celle de 1889)... On s'égare on s'égare... Mais cela est pour plus tard, c'est une autre histoire...😊


> Dans la famille Larrieu, originaire de Bretagne, on trouve Joseph, le grand-père, banquier doté de gros moyens au point d’acheter aux enchères le château Haut-Brion, le 12 mars 1836.😊 (Le domaine du château Haut-Brion est resté dans la famille Larrieu jusqu’en 1922, il est depuis 1975 la propriété de la famille du Prince du Luxembourg).

Très attentif au travail de la vigne et exigeant sur la qualité, son domaine est classé premier grand cru des vins de Gironde en 1855. Au décès de Joseph, Amédée Larrieu (1807/1873) se retrouve à la tête du célèbre vignoble. En 1869, il est élu député puis sera nommé le 4 septembre 1870 Préfet de la Gironde.

Eugène, l’un de ses fils, né au château Haut-Brion le 20 octobre 1847, le remplace à la tête des propriétés familiales. C’est au nom de son père Amédée, qu’Eugène Larrieu décide de léguer 150 000 francs à la ville de Bordeaux.

En contrepartie, celle-ci doit signaler que le tableau d’Eugène Delacroix « Boissy d’Anglas à la convention » de 1831 (visible au Musée de Bordeaux)  est un don de la famille Larrieu, et donc édifier une fontaine sur la place qui porte déjà le nom de notre célèbre mécène.😊

> L'ancien marché est démoli à la fin mars 1901. Son successeur, le marché couvert (ou "salle Amédée Larrieu") sera désaffecté et en 1983, s’installe l’école du cirque😊, jusqu’à son déménagement aux Bassins à flot. Devenu salle municipale, l’ancien marché est utilisé comme salle de sport ou de théâtre / festival, comme foyer pour les sans abris en hiver, bureau de vote, salle de vide-dressing, salle de réunion, salle de repas bimensuel destinés aux sans-abris et aux personnes isolées (organisé par Le 4 de bdx ), et depuis il accueille aussi le marché Saint-Nicolas

> La Place Amédée-Larrieu a même sa page Facebook 😊:  ici  .

(journal/la-petite-gironde/26-mai-1897)

(journal/la-petite-gironde/7-decembre-1897)
(journal/la-petite-gironde/8-decembre-1897)
(journal/la-petite-gironde/15-decembre-1897)
(journal/la-petite-gironde/9-decembre-1897)
(la-petite-gironde/6-aout-1936)
(journal/la-petite-gironde/25-mars-1899)
(journal/la-petite-gironde/5-mai-1900)

(journal/la-petite-gironde/29-octobre-1900)
(journal/la-petite-gironde/3-novembre-1900)
(journal/la-petite-gironde/18-avril-1921)
Le 1er prairial an III, soit le 20 mai 1795, vers midi, des émeutiers, dont principalement des femmes, victimes de la disette due à un hiver rigoureux, venus du faubourg Saint-Antoine au son du tocsin, se soulèvent contre la Convention thermidorienne et exigent le rétablissement de la Terreur. Ils soupçonnent l'assemblée d'être liée aux royalistes et de vouloir le fin de la République. Ils envahissent, en armes, la salle des séances, insultent et menacent Boissy d'Anglas, qui vient de prendre la présidence. 
Membre du comité de salut public, chargé des subsistances et de l'approvisionnement à Paris, celui-ci est spécialement impopulaire. Surnommé Boissy-Famine par les Parisiens, il est accusé par Sébastien Mercier d'être un «royaliste déguisé», organisateur de la pénurie. Les insurgés lisent le pamphlet «L'insurrection du Peuple pour obtenir du pain et conquérir ses droit» qui circule en ville depuis le 30 floréal. Le député du Finistère, Augustin de Kervelegan,  qui s'interpose, est blessé d'un coup de sabre au pied de l’estrade. Boissy d'Anglas est cerné. Pour l'effrayer, la populace lui tend, au bout d'un pique, la tête du représentant Jean Bertrand Féraud, abattu d'un coup de pistolet durant l'émeute. Frappé de stupeur, Boissy d'Anglas se lève, se découvre et salue respectueusement son infortuné collègue. Il demeure à son poste, silencieux, sans céder sa place, empêchant la dissolution de l'assemblée, jusqu'à ce que la Garde nationale délivre la Convention vers 11 heures du soir.
On ne saura jamais si l'impassibilité de Boissy d'Anglas résultait d'un courage lucide et héroïque ou de la peur de mourir qui le paralysait. Mais son inactivité et son imperturbabilité ont un effet déconcertant sur la foule, qui y voit la légitimation de son action homicide et épargne sa vie.  En même temps que ses collègues admirent sa dignité à saluer le macabre trophée qui lui est présenté, son calme devient stoïcisme. Son geste répond à l'attente des uns et des autres. Sans un mot, il est l'homme de la situation. Il prend place parmi les icônes de l'histoire de la Révolution. Cas d'école pour tout politique qui rêve, en un seul geste symbolique, de rassembler ainsi les contraires ! 

Le tableau de Delacroix, exposé à Bordeaux, est original dans sa manière de traiter le sujet. Délaissant le mode figuratif, il privilégie le mouvement et les lignes. Un flot continu s'écoule d'un bouche sombre et remonte vers la tribune. Boissy d'Anglas en émerge, dans une verticale fragile -il se tient jambes écartées- comme en suspension sur la vague constituée d'une série d'obliques et de tourbillons.

Le résultat de mes recherches & synthèse des informations, de la construction des sections & mise en forme, et de la découverte des données d'illustrations/photos sur cette FONTAINE AMÉDÉE-LARRIEU sont entièrement issus de mon travail personnel. Je cite mes sources ci-dessus 📜.

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> Création de la page & publication: 25 Janvier 2018. Posté le même jour sous pseudo "Djé Karl" sur le groupe public Facebook Bordeaux Je Me Souviens: LIEN du post